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Un véritable gentleman anglais
d’Ariel Frailich
J’ai rencontré Alex Elmsley pour la première fois au congrès Ron McMillan Day of Magic en décembre 1974. Avec l’audacité des jeunes, je lui ai montré mon Point of no return (décrit dans Card Stories). Je ne sais pas s’il a aimé le tour ou non, mais, en parfait gentleman, il a hoché la tête comme en approbation.
Nous nous somme rencontrés encore une fois au congrès Abbott’s Magic Get-Together à Colon, au Michigan, en août 1975.
Après le congrès d’Abbott’s, Elmsley a fait une tournée aux É.-U. et au Canada avec sa fameuse conférence Dazzle. Dire que cette conférence était fantastique ne lui ferait pas justice. La conférence Dazzle est devenue quasi-légendaire parmi les cartomanes partout. Même les jeunes magiciens d’aujourd’hui, qui ne la connaissent que par ouï-dire, en parlent avec le plus grand respect.
À Toronto, la conférence était organisée par Howard Lyons (de la revue magique Ibidem) et Allan Slaight. Allan était le chef de la chaîne de télévision Global TV à l’époque et a gracieusement mis la salle de conseil de la société à notre disposition pour la conférence. La conférence était limitée à vingt personnes, et uniquement par invitation.
La conférence commença. Elmsley était nerveux, mais ça n’avait aucune importance: il nous avait dans la paume de la main. Il nous a émerveillé non seulement avec sa maîtrise de la cartomagie, mais aussi avec ses théories perspicaces sur la misdirection et la présentation, ainsi qu’avec son aptitude à divertir son public, choses auxquelles on ne s’attend pas, en général, de la part d’un cartomane.
Deux heures plus tard, la conférence finit, mais ça n’a pas empêché Elmsley de continuer sur sa lancée. Il a poliment et gracieusement répondu a plusieurs questions, puis il nous a montré des tas de tours supplémentaires pendant près de deux heures! Je crois pouvoir affirmer que la conférence Dazzle était unique en son genre à Toronto: nous avons eu droit à deux conférences merveilleuses pour le prix d’une seule!
Alex Elmsley est resté quelques jours de plus à Toronto, où il a visité sa fille. Deux jours après la conférence, il y avait une réunion du club de magie. Elmsley y a assisté, ensuite les ‹oiseaux de nuit›—Tom Ransom et moi, en l’occurrence—l’avons invité à venir boire un verre au pub, où nous avons bavardé et montré quelques tours.
À un certain moment, Elmsley a dit qu’il voulait nous montrer quelque chose qui devait se faire avec un jeu complet. Nous avons cru savoir ce qu’il tramait: après tout, Elmsley était mathématicien et informaticien, et il a écrit des traités sur l’aspect mathématique du mélange faro. «UNE, Deux, trois, quatre…» Nous avons attendu patiemment qu’il finisse de compter les cartes. «…quarante-neuf, cinquante, cinquante-et-un, CINQUANTE-DEUX CARTES. Et si je retire maintenant une, deux, trois cartes…» Tom et moi avons éclaté de rire.
La soirée se termina. J’étais le premier à quitter le pub. En attendant mes compagnons, j’ai remarqué un buisson dans un pot en béton devant un bâtiment avoisinant. À cette époque, les magiciens me taquinaient en disant que j’étais victime de la ‹maladie de Frailich›, maladie qui entraîne un besoin compulsif de faire prendre une carte à quiquonque se trouve dans les parages. Fidèle à ma réputation et avec l’espoir de faire rire mes amis, je me suis approché du buisson et j’ai sorti mon jeu de ma poche en faisant mine de lui faire prendre une carte. Puis j’ai attendu.
Tom et Alex sont sortis du pub et bavardaient. Puis ils m’ont vu et se sont instantanément tus. Je retenais mon souffle. Quelques instants plus tard, Tom s’est dirigé vers le buisson, à ma droite, aussi avec son jeu tendu vers le buisson.
Un instant plus tard, Elmsley s’est approché du buisson, à ma gauche. Encore une fois, j’ai retenu mon souffle.
Et puis il a sorti son jeu et, lui aussi, l’a tendu vers le buisson!
Nous sommes restés là, immobiles et silencieux, pendant quelque temps. Puis, sur un ton professoral, il dit: «La magie pour les objets inanimés. C’est une idée intéressante.»
Un véritable gentleman anglais, complet avec un sens de l’humour raffiné. Ce fut un vrai plaisir d’avoir fait votre connaissance, M. Elmsley.
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